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No 59, juin 2001
No 59, juin 2001
Publié le vendredi 28 septembre 2007

Superphénix en démantèlement, revoilà Phénix !

Arrêté à nouveau en novembre 1998 sur un défaut de fonctionnement, Phénix subit des travaux de rénovation. Prévus pour un an et 630 millions de FF, ils durent depuis deux ans et demi. Laissera-t-on cette machine infernale, conçue en 1970, menacer encore longtemps la sécurité des français (ndlr : et de leurs voisins) ?

Qu’est-ce, Phénix ?

Phénix, construit à Marcoule, est le prototype des surgénérateurs français. Ce surgénérateur est un réacteur électronucléaire à neutrons rapides, alimenté en plutonium et refroidi au sodium liquide. Les réacteurs actuels d’EDF sont à neutrons lents, alimentés en uranium (ou en MOX) et refroidi à l’eau sous pression. Phénix a été raccordé au réseau d’EDF en 1973 auquel il fournit 250MWe. Il contient 1,5 tonnes de plutonium et 1500 m3 de sodium liquide. Ce dernier doit être toujours maintenu à plus de 60°C pour être liquide. Quand la réaction nucléaire est arrêtée, cette température est maintenue en consommant le courant d’EDF.

Après la fermeture de son aîné Superphénix (SPX), Phénix, arrêté depuis 1995, a été remis en service en 1997. Il sert aujourd’hui à chercher à améliorer la construction des surgénérateurs, à y étudier l’emploi du plutonium comme combustible, à essayer d’autres enveloppes de gainage des combustibles et à étudier la transmutation des déchets de haute activité par bombardement aux neutrons rapides. Cette dernière application, inscrite dans la loi Bataille d’élimination des déchets nucléaires, était dévolue à Superphénix, aujourd’hui arrêté. Phénix a été remis en service en 98 pour le remplacer. Ce choix a donné lieu à un débat au Parlement, où les défenseurs de SPX ont évoqué le risque qu’il y avait à réutiliser Phénix.

La place de Phénix dans le cycle du combustible nucléaire d’EDF

Le choix du retraitement du combustible usé issu des réacteurs à eau pressurisé (REP) s’inscrit dans la reconversion massive d’EDF vers le nucléaire suite au choc pétrolier des années 60. Après avoir expérimenté ce mode d’extraction du plutonium à des fins militaires (UP1à Marcoule), la Cogema a construit deux usines identiques à La Hague pour produire le plutonium nécessaire aux surgénérateurs, comme Superphénix (SPX). Le plan était alors : un SPX pour cinq REP, ce qui ferait aujourd’hui 15 SPX pour 58 REP ! Comme ce plan n’a pas vu le jour, on mélange le plutonium à de l’uranium appauvri, cela s’appelle le MOX, utilisé à la place de l’uranium dans 20 réacteurs d’EDF. Des 800 tonnes de combustible usé retraitées aujourd’hui pour EDF, il sort huit tonnes de plutonium par an, qui se transforment finalement en MOX usé. Cependant le stock de plutonium à la Hague est de 78 tonnes (pour 400 tonnes environ dans le monde).

Les autres produits du retraitement, qui est une séparation chimique, sont de l’uranium dit « de retraitement » (URT), pour 95%, et des déchets de Haute Activité à Vie Longue (DHAVL), pour 4%. Ce sont ces derniers qu’il est question de ramener à l’état non radioactif par bombardement neutronique dans Phénix. Ces essais poursuivis dans les laboratoires Atalante de Marcoule ne concernent que la moitié des DHAVL de masse supérieure à l’uranium, les transuraniens. Nombreux sont les experts qui ne croient pas que cette activité puisse atteindre le stade industriel. L’argument ultime pour justifier le retraitement est donc la réduction du volume des déchets à stocker. Contesté depuis longtemps, il vient d’être à nouveau mis en doute récemment dans le rapport Charpin, Dessuse et Pellat sur le coût du kWh nucléaire.

Le recours en justice du Forum Plutonium

Le Forum Plutonium est une association créée en 1994, à la demande des militants antinucléaires pour les informer de la progression des risques liés à l’emploi du plutonium comme combustible nucléaire. Ces risques sont de deux ordres, l’un relatif à la prolifération de la bombe atomique, puisque 6 Kg de Pu suffisent à la confection d’une bombe artisanale de la puissance de celle de Nagasaki, l’autre d’ordre environnemental puisque un microgramme ingéré par un être vivant suffit à le détruire, lui et sa descendance, par cancer, leucémie et mutation génétique.

Conscient du risque inhérent à Phénix et de son inutilité, le Forum Plutonium a déposé en mai 98 un recours en annulation de sa remise en route auprès du Tribunal Administratif.

Les arguments du Forum Plutonium

Remise en route illégale sans enquête publique après deux ans sans exploitation

  • La radio-toxicité du Pu contenu dans le MOX à 20% utilisé
  • Modification de la destination de Phénix sans modification de son décret de création.
  • Risque de pollution et de prolifération par ce combustible et son transport.
  • Le risque d’incendie lié au sodium maintenu à 250°C en fonctionnement normal. Il s’enflamme à l’air et explose en présence d’eau ( précédents à Monju, Japon, et à Cadarache
  • Quatre arrêts d’urgence sur Phénix entre 89 et 90, toujours inexpliqués Les arguments du Commissariat à l’Energie Atomique
  • Puisque le sodium est maintenu liquide le réacteur n’est pas à l’arrêt.
  • Le rôle de Phénix était d’y faire des essais dès sa création.
  • Le Forum Plutonium n’est pas fondé pour agir en justice

L’Argent du CEA

En France, depuis au moins une décennie 90% des dépenses de Recherche et Développement dans le domaine de l’énergie vont au nucléaire, ce qui explique la persistance du choix du tout-nucléaire pour la production d’électricité.

Entre 93 et 95, Phénix a fonctionné 115 jours, puis a été arrêté jusqu’en 98, pour une remise à niveau de 600 MF. De mai 98 à novembre 98, il a fonctionné 150 jours et est arrêté depuis pour une autre mise à niveau de 650 MF devant durer un an. Donc en 8 ans, Phénix aura fonctionné moins d’un an pour une dépense globale estimée à ….4,17 milliards de FF, (coût de fonctionnement et travaux de remise à niveau) ! Les gestionnaires des fonds du CEA doivent se poser des questions.

Jean-Pierre Morichaud, ingénieur physico-chimiste, secrétaire du Forum Plutonium

 
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