No 55, décembre 2000
dimanche 30 septembre 2007
par ContrAtom

Un « consensus » mou pour une fausse sortie ?

Le gouvernement fédéral dit « rouge-vert » et les compagnies électriques se sont mis d’accord pour « limiter » la durée d’exploitation des centrales nucléaires existantes. Mais, d’autre part, la « libre exploitation » des centrales doit être garantie, tout comme le maintien d’un « haut niveau de sécurité » et le respect des dispositions légales pour leur durée d’exploitation restante, ainsi que le démantèlement. Pour chaque installation, on a défini la quantité d’électricité maximale qu’elle est autorisée à produire entre le premier janvier 2000 et son arrêt définitif (quota de production électrique). L’autorisation d’exploiter une centrale échoit dès que la quantité prévue d’électricité est atteinte par celle-ci ou plutôt la quantité modifiée par les éventuels reports. Pour chaque centrale, ce calcul se fait sur la base d’une durée d’exploitation de 32 ans à partir du démarrage de l’exploitation commerciale, ce qui permet de calculer la durée d’exploitation restante après le premier janvier 2000. Pour Obrigheim (mise en service en 1968), un régime transitoire a été décidé jusqu’au 31 décembre 2002. Ces calculs se fondent également sur une production de référence qui correspond pour chaque centrale à la moyenne annuelle de la production des cinq années les plus productives entre 1990 et 1999. Cette production annuelle de référence s’élève pour l’ensemble des centrales nucléaires à 160,99TWh/an, sans la centrale nucléaire déjà arrêtée de Mülheim-Kärlich. (Un terrawatt/heure correspond à un milliard de kilowatts/heure). Les sociétés de distribution peuvent reporter d’une centrale à une autre des quantités d’électricité à produire (droits de production) par simple communication à l’Office fédéral pour la radioprotection ( BfS ). Pendant la durée d’exploitation restante, les normes de sécurité élevés prescrits par la loi devront continuer à être respectés, mais le gouvernement fédéral s’abstiendra de toute initiative pour modifier ces standards et la conception de la sécurité qui les sous-tend. Les sociétés de distribution doivent construire le plus rapidement possible des dépôts intermédiaire sur l’emplacement des centrales nucléaires ou à proximité de celles-ci. Dès le premier juillet 2005, l’élimination des déchets radioactifs issus des centrales nucléaires se limitera à leur stockage définitif direct. Jusque là, les transports nucléaires en vue du retraitement restent autorisés. Face à ce soi-disant consensus atomique, Greenpeace Allemagne a pris position comme suit : le consensus atomique négocié aggrave les risques liés à l’utilisation de l’énergie nucléaire en Allemagne, il ne contraint pas les sociétés électriques à arrêter des centrales, mais leur garantit une autorisation d’exploiter à vie. De plus, le gouvernement fédéral, en garantissant aux exploitants « la libre exploitation des installations » a massivement restreint sa propre influence sur la sécurité des centrales nucléaires. Au lieu de réaliser une sortie rapide du nucléaire, le gouvernement fédéral a offert aux exploitants de centrales une garantie du maintien de leurs installations. Avec les quantités d’électricité à produire issues de ces négociations, aucune centrale ne devra être arrêtée prématurément, mais chacune pourra rester branchée au réseau aussi longtemps que cela semblera rentable à l’exploitant. Sur une base de calcul réaliste, la quantité globale d’électricité de 2600 terrawatt/heure correspond à une durée de vie globale de 35 ans pour chaque réacteur ! Jusqu’à ce que le dernier réacteur ait été arrêté, on aura accumulé près de 7000 tonnes de déchets hautement radioactifs supplémentaires... quantité presque équivalente à celle qu’a entraîné jusqu’ici l’exploitation de l’énergie nucléaire en Allemagne depuis ses débuts !!! On voit que finalement la situation en Allemagne ressemble à celle de la Suisse : un arrêt du nucléaire qui prolonge les centrales actuelles (voir No 54 et article d’ACR p. 8-9). Ce qui signifie que l’on a pas encore fini de parler de nucléaire en Allemagne et que, comme nous le faisons déjà à Genève, il faudra encore se méfier et ne pas se réjouir trop fort de décisions prises par les autorités ici et ailleurs.

Philippe Progin

Source : Greenpeace Allemagne